Journée doctorale Ce que vieillir veut dire en littérature

Publié le 23 juin 2025 Mis à jour le 23 juin 2025
Date(s)

le 8 juillet 2025

Une journée doctorale organisée par Chandra Feupeussi, Docteure associée au CTELA et Simona Jișa (MCF, Université Babeş-Bolyai, Cluj-Napoca, Roumanie)
Cet évènement est proposé en distanciel.
 

Lorsque le « roman de formation » de toute personne arrive à son bout et que le vers ronsardien « Quand vous serez bien vieille… » change ce futur (inattendu) dans un présent qui est inéluctable, voici venu le moment d’une réflexion sur une période de la vie qui semble perdre tout attrait…

Dans son essai sur La Vieillesse en 1970, Simone de Beauvoir, parlant de sentiments pour les personnes d’un certain âge, argumentait que « chez eux l’amour, la jalousie semblent odieux et ridicules, la sexualité répugnante » (p. 9). Elle s’exprimait alors sur les personnes du troisième âge, ce qui traduit une volonté de dénoncer les stéréotypes liés à l’âge. En cela, elle est rejointe par des théoriciens et critiques littéraires comme Alain Montandon, coordonnateur du volume Écrire le vieillir (2005), Martine Boyer-Weinmann (Vieillir, dit-elle : une anthropologie littéraire de l’âge, 2013). La littérature a étudié cette thématique et continue d’apporter des éléments de (dé)construction afin de contribuer à l’édification de la question.

Le but de cette journée doctorale est de mener une réflexion sur le vieillir, la vieillesse, l’âgisme. Repenser tout le paradoxe qui nourrit ces notions. Il paraît également convenir d’examiner ces notions à la lumière du genre. Dans les arts contemporains et la littérature, le vieillissement se laisse appréhender selon qu’il s’agit d’un homme ou d’une femme ; la compréhension du sentiment amoureux varie selon qu’il est question du genre du corps. Martin Walser suggère dans son roman Der Lebenslauf der Liebe (2001) que l’Éros ne vieillit jamais, mais qu’en est-il réellement ?

Le vieillir ici n’est pas circonscrit aux seniors mais ouvert à tout personnage qui, par rapport à son âge, se retrouve confronté à des discriminations ou stéréotypes dans son quotidien. Du regard porté sur les autres (ancêtres, aïeuls, grands-parents, parents), le regard peut revenir vers soi, impliquant une gamme de sentiments, positifs ou négatifs, tournant souvent vers l’empathie. Victime malade ou non de cette finitude humaine qu’on espère le plus loin possible, la littérature peut-elle « réparer » quelque chose (Alexandre Gefen, 2017) ? La thématique peut se décliner sous divers angles. L’âge mental peut être comparé à l’âge réel et mis à contribution pour démontrer l’escalade analytique qui est très souvent faite quand il s’agit de porter des jugements sur les agissements d’un personnage.

Personnage, principal ou secondaire, actant ou acteur, adjuvant ou opposant (Greimas, Du sens, 1970) ou personnages référentiels, embrayeurs ou anaphores (Hamon, 1977), une multitude de lectures reste possible, quelques grilles qu’on applique. Analyser l’impact de ce personnage dont l’âge se fait sentir (« l’effet-personnage », selon Vincent Jouve), le placer dans une panoplie des mythiques grecs ou littéraires, où la sénescence est surtout associée à la sagesse (Tithon, la vieille Sybille, Gêras, Dioogène) sinon à la folie (le roi Lear) ou l’absurde (les vieux dans le théâtre de Beckett ou de Visniec).

Cette thématique du vieillir peut s’examiner sous plusieurs autres prismes, à l’instar de celui du postcolonial. Se comprend-elle de la même manière quel que soit l’origine de son auteur ? Et dans l’entre-deux, qu’il soit question de l’auteur ou de son personnage, de plus en plus à cheval entre plusieurs continents, le rapport en est-il le même ?

Dans le même temps, on peut se demander si la question du vieillir est un facteur de renfermement. Sur le plan de la psychanalyse et de la sociologie, les concernés doivent-ils se sentir interpellés par le regard de l’autre ? Ce regard, est-il approprié qu’il interroge autrui ? Voilà autant de questions que la littérature soulève et auxquelles elle tente de répondre.


Le programme complet est diponible en téléchargement.